Constat d’un bouleversement de Gérard Vignaux, philosophie, psychanalyste
Par Christelle Moreau, vendredi 17 juin 2011 dans Articles
Légèrement plus d’un siècle nous sépare du début de la psychanalyse mais l’évolution de la société durant cette période est telle qu’un gouffre sépare ces deux époques.
Nul ne peut nier l’évolution économique, culturelle, sociale, technologique, le bouleversement des mœurs qui, en eux-mêmes, représentent l’identité d’une société.
Les enseignants, tous ceux qui ont une fonction d’aide aux personnes mais aussi, bien sûr, les praticiens, s’interrogent sur la question des nouvelles pathologies (dépressions, addictions, pathologies narcissiques, crises de l’adolescence, crises de milieu de vie, stress professionnel, maladie d'idéalité…). Une étude récente de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) montre que le nombre de cas de dépression s’est multiplié par 7 pendant les trente dernières années dans les pays industrialisés. La dépression est la maladie de notre temps comme pouvait l’être l’hystérie à la fin du 19e siècle.
Dans les grandes métropoles, ce début du 21e siècle voit la naissance d’une nouvelle classe sociale : les bobos (les bourgeois bohèmes) traduction de bourgeois bohemian, ex yuppies mais avec éthique écologique et citoyenne. Ces jeunes dynamiques, créatifs, voyageurs, sont actuellement ceux qui ont recours le plus souvent aux psy. Une expression souvent utilisée: « mon psy m’a dit » souligne donc qu’un psy ne fait pas seulement qu’écouter mais aussi peut et doit parler, souligne aussi que chacun doit avoir son psy. Jamais une classe sociale n’a eu recours aux psy d’une façon si massive et si régulière. Ces bobos, le plus souvent diplômés de l’enseignement supérieur, sont cadres, travailleurs indépendants ou artistes ; cette classe sociale commence à s'étendre aux fonctionnaires et aux employés du secteur tertiaire. L’investissement intellectuel de ces jeunes adultes est culturel, politique, artistique et parfois spirituel avec une multitude d’approches cosmopolites.