Contrôle du stimulus

Une première façon de gérer les envies de fumer est de contrôler les stimulus. Il est évidemment nécessaire de bien connaître d’avance les situations déclenchantes : voir du tabac, voir des personnes fumer, les situations auparavant associées au tabac, les émotions, fatigue, tension…


Stratégies cognitives d’opposition

Un certain nombre d’opérations cognitives permettent de contrôler, de réduire l’intensité et la durée des envies de fumer :

  • -Se souvenir que les envies vont par vagues et sont brèves, et que par conséquent cela ne va pas durer.
  • -Dédramatiser : « que représentent ces difficultés au regard de grandes souffrances ? » (suggérer un comparatif évident comme une situation de guerre, de famine, de deuil…) ; « quel jugement porterai-je dans six mois sur mes difficultés de l’instant ? ».
  • -Occuper le terrain cognitif par des slogans répétés en boucle (par exemple « la cigarette, j’arrête »).
  • -Se répéter la liste de ses motivations (bénéfices liés à l’abstinence, inconvénients de fumer). Cette opération est plus efficace si la liste des motivations est notée sur un support affiché dans les lieux les plus fréquemment fréquentés (bureau, réfrigérateur…) ou conservée dans son portefeuille.
  • -Penser à autre chose de plaisant. De la même façon qu’on peut couper court à une conversation pénible en changeant de sujet de conversation, on peut également puiser dans un stock de pensées plaisantes (vacances, enfants…)
  • -Auto-encouragement.


Stratégie cognitive d’accompagnement

Plutôt que s’opposer à l’envie de fumer, une autre stratégie consiste à accompagner l’envie de fumer (comme on peut par exemple accompagner le mouvement d’une attaque en judo ou en aïkido), cela s’appelle surfer sur la vague (de l’envie de fumer). Cette opération nécessite de s’installer confortablement et de se concentrer sur l’ensemble des sensations physiques et psychologiques qui caractérisent l’envie de fumer. L’attitude mentale est celle d’un explorateur curieux. Le sujet va contrôler toutes les manifestations (physiques et psychologiques) en faisant l’inventaire, mesurant l’intensité, observant l’augmentation progressive, la stabilisation au point d’acmée et enfin la diminution et la disparition des symptômes. Cette stratégie d’accompagnement des symptômes permet un sentiment de contrôle de la situation qui est efficace.

Stratégies comportementales

  • changer de contexte. Les envies de fumer étant liées aux situations déclenchantes, le changement de contexte devrait permettre un certain contrôle.
  • s’engager dans une activité brève (tâches ménagères brèves, brossage de dents…). Ceci sera d’autant plus efficace que l’activité est plaisante (boire une boisson fraîche, prendre un fruit… ).
  • Les activités physiques sont particulièrement efficaces pour réduire (et même prévenir) les envies de fumer.La prise d’une gomme ou d’un comprimé sublingual nicotinique, bien que le délai d’efficacité soit d’environ 5 mn, donne un sentiment de contrôle de la situation.
  • Faire des exercices de relaxation respiratoire
  • Parler à une personne soutenante.


GÉRER SES PENSÉES DE TABAC

Au delà des envies de fumer, phénomènes ponctuels répondant le plus souvent à une situation déclenchante, il arrive que le patient développe des pensées liées au tabac. Il s’agit là d’un phénomène plus insidieux et chronique, qui peut fragiliser le patient face au risque de rechute. Ces pensées de tabac peuvent bien entendu s’accompagner d’envies de fumer. Pour gérer les pensées liées au tabac, il est évidemment d’abord indispensable d’identifier le processus cognitif. Ceci nécessite que le sujet soit habitué à être à l’écoute de ses pensées et soit capable de repérer dans son comportement des manifestations évocatrices (par exemple choisir un wagon fumeurs). Gérer correctement ses pensées liées au tabac nécessite également d’être conscient du danger que représente le processus cognitif.

Circonstances d’apparition

Situations de crise : le sujet peut alors penser qu’à une situation exceptionnelle, il est licite de trouver un remède exceptionnel (autoriser une cigarette).
  • Sensation de mal-être dans l’abstinence tabagique
  • Doute sur sa capacité à rester abstinent
  • Nostalgie de la cigarette
  • Curiosité (« je me demande que va me faire une cigarette après tout ce temps sans fumer ? »)
  • Test de contrôle (« peut-être puis-je contrôler ma consommation de tabac ? »).
  • Détente (« après tout ce que j’ai fait, il est bien normal que je puisse me détendre avec une cigarette »)
  • Abandon de la lutte (« A quoi bon ? », « je ne suis pas capable de contrôler »).


Stratégies cognitives

  • S’opposer directement à l’idée de fumer (« je sais que je ne peux pas prendre une cigarette sans prendre un grand risque de rechuter », « il y a d’autres façons de me détendre, ou de gérer la crise, que fumer une cigarette », « j’ai décidé de ne plus fumer, je m’y tiens »).
  • Se réciter sa liste des motivations (bénéfices liés à l’abstinence, inconvénients de fumer)
    • Penser à autre chose (de plaisant)
    • Auto-encouragement


    Stratégies comportementales

    Les pensées liées au tabac sont favorisées par les moments d’oisiveté. Il est utile d’avoir un emploi du temps chargé les premiers temps après l’arrêt du tabac. Il est souhaitable également de programmer des activités de plaisir, qui permettront de vivre moins durement l’abstinence tabagique, et de compenser au moins partiellement la perte du plaisir de fumer. Parmi les activités à programmer, les activités physiques et sportives sont particulièrement efficaces, parce qu’elles permettent de mieux prendre la mesure des bénéfices liés à l’abstinence, d’obtenir des satisfactions assez rapides grâce aux progrès réalisés dans les premiers temps qui suivent la reprise d’une activité sportive abandonnée. Les activités physiques et sportives permettent également de mieux contrôler les manifestations anxieuses et dépressives. Enfin, elles permettent de rééquilibrer le bilan énergétique, souvent défavorable après l’arrêt du tabac.

    LES DECISIONS A PRENDRE

    Un certain nombre de décisions sont à discuter avec le patient :

    -Conserver du tabac à la maison ? Il vaut évidemment mieux se séparer du tabac à la date d’arrêt (le mouiller puis le jeter), retirer les briquets et les cendriers. Evidemment, tout ceci est possible s’il n’y a pas d’autres fumeurs à la maison. Curieusement, certains patients pensent qu’ils seront aidés s’ils gardent des cigarettes sous la main.

    -Annoncer qu’on a arrêté de fumer ? C’est un élément important du soutien social.

    -Fréquenter les lieux à risque (comme le bistrot, l’espace fumeurs au travail…) ?

    -Se rendre à une soirée où les gens fument ? (Peut-être à éviter au début).

    -Planifier son temps libre ?

    AVOIR SON PLAN D’URGENCE POUR LA GESTION D’UN FAUX PAS

    Quelles sont les conséquences d’une première cigarette venant entacher une période d’abstinence ? Le plus souvent cette première cigarette, plutôt que de réduire durablement le besoin de fumer, l’augmente au contraire. Chez la personne qui avait décidé de s’arrêter et qui a fait des effort pour s’y tenir, cette première cigarette provoque une baisse de la confiance en soi, éventuellement accompagnée d’un sentiment de honte ou de culpabilité. Tous ces éléments concourent à réduire la capacité du sujet à mobiliser ses ressources personnelles pour s’en tenir à ce faux pas (effet de violation de l’abstinence). Il y a donc risque de perte de contrôle puis de rechute.

    Parfois, au contraire, la première cigarette est banalisée dans un contexte de confiance en sa capacité de contrôle. A ce moment, il y a risque de répétition, même espacée, puis de rechute.

    Une idée largement répandue est que la rechute est inéluctable après une première cigarette. Cette seule idée interdit bien évidemment la mobilisation de toute ressource pour s’en tenir à un faux pas. Bien que le risque de rechute, après une première cigarette, soit élevé, il n’est cependant pas à 100 %. Il y a bien évidemment moyen de circonscrire cette cigarette ou cet épisode à un faux pas.

    Il y a un discours délicat à tenir, qui permet de dédramatiser l’éventualité d’une reprise de cigarette, avec la possibilité de revenir immédiatement vers l’abstinence, tout en proscrivant l’idée de reprendre malgré tout une cigarette, ce qui induirait un risque important de rechute.

    Une gestion réussie de la situation à risque induit un renforcement de l’abstinence par augmentation de la confiance en soi et amélioration de ses compétences. En revanche, en cas de gestion défaillante et de reprise de cigarettes, il faut analyser la chaîne d’événements et de pensées qui ont conduit à la reprise du tabac et chercher quelle stratégie plus efficace aurait pu être adoptée.