rosette — 25-01-2011 16:00 |
Bonjour, Je viens vers vous pour vous demander comment « sortir » d ‘un manque à être. J’ai rencontré le problème suivant : lorsque j’ai rencontré mon ami, les émotions ont été telles que je n’ai pu faire de discernement pendant 3 ans entre « le quitter » et « l’aimer » et donc être dépendante de son amour. Aujourd’hui je me rends compte, que si j’ai rencontré ce problème c’est que je n’étais que dans mon mental, dans l’imaginaire, dans le jugement, et que j’ai beaucoup de mal à me décentrer. En effet, je croyais aimer mon ami, mais je me rends compte que c’était un amour « immature » basé sur des attentes et non pas sur « donner » à l’autre, lui faire une vraie place… Beaucoup d’angoisses ont surgit (que j’ai malgré tout camouflé) car en apparence, je sors, je fais des choses, je travaille, mais au fond de moi, c’est le vide, le manque à être. Du mal à me sentir avoir une place, toujours en retrait… Du mal à aimer. Bien sur j'ai fait le lien avec mon passé, le couple parental...mais c'est difficile de sortir des patterns. Merci de votre aide.
|
georgesN — 26-01-2011 08:36 |
"un manque à être" l'usage de cette expression (assez connotée "psy") tendrait à montrer que vous avez déjà entamé, au moins intérieurement , une "plongée en vous". Ne sentez-vous pas l'actualité de prolonger avec un professionnel cet insight? Mettre du sens: voilà un projet de vie qui fait sens, non ?
|
rosette — 26-01-2011 09:23 |
merci pour votre intervention; je travaille avec un psy déjà depuis quelques années, et oui j'ai plongé en moi cela n'empêche pas les angoisses . Trouve un sens à sa vie reste pour moi une difficulté : je pensais que l'amour de mon ami m'y aiderait, mais comme je vous le disais, cette manière de rester en retrait est tenace. Je doute beaucoup sur le résultat de tout ce travail analytique. Et quelques fois je regrette de ne pas être restée aveugle... j'ai lu beaucoup de choses notamment "l'art d'aimer" que je trouve très psy. En fait j'ai peur que ma manière d'être me fasse tomber dans la folie (ne pas réussir à se sentir femme, adulte.... et me retirer du monde trop angoissant) Je précise que mon père était très autoritaire, et ma mère très soumise, effacée, et qu'elle n'a consacré sa vie qu'à son travail. Comment trouver dans ces conditions le plaisir de vivre ? trop de culpabilités; Bien à vous
|
georgesN — 26-01-2011 09:56 |
votre questionnement ...pose question! Il pose tout simplement le problème de "la psychanalyse pour quoi faire". Comme chaque psychanalyste devrait le faire avant qu'un Onfray ne fasse le chien fou narcissique tueur de père. Pour votre histoire, je reste dans une perplexité: si la seule interprétation, le seul os à ronger que vous ait donné votre analyste c'est "manque à être", ça fait peur... Manque à jouir serait peut-être plus adéquat et moins violent ?!
|
rosette — 26-01-2011 10:52 |
merci encore pour votre intervention.
Effectivement mon psy m'a surtout parlé du manque à être, et oui c'est violent, car déjà que je me sentais être rien.
Il est lacanien, et depuis quelques temps, j'ai envie de changer car j'ai rencontré une femme psychanalyste lors d'un psychodrame. Et je trouve qu'il me laisse trop dans mon marasme, et mes culpabilités (mais je me suis dite que c'était à cause du transfert : la peur du père) mais cela fait un moment que je suis dans une impasse, face à un mur. Il me dit que vouloir quitter mon ami est un fantasme,(je suis souvent dans un imaginaire) mais aussi que de me marier avec lui (car mon ami veut que nous nous engagions) pourrait être dangeureux pour moi....j'ai bcp de colère en moi qui n'a jamais été exprimée vis à vis de mon père, aucun positionnement possible avec lui et qui pourrait peut être surgir. Tant je suis éprise de liberté.
Alors que la femme psy me parait être plus compatissante.
Si je ne sais pas jouir de la vie, cela ne veut pas dire que je ne suis rien, je suis quelqu'un qui a du mal à vivre le plaisir, les relations intimes...trop contraintes trop tôt, ou ayant mal vécu l'indisponibilité de ma mère, et les critiques incessantes de mon père.
une difficulté à être donc dans ma vie.
Vous me dites que vous êtes étonnés par mes questions, pensez vous qu'un changement de psy puisse m'apaiser ? Pourquoi la psychanalyse ? se comprendre, et s'accepter. mais j'ai du mal.
Merci encore pour votre intervention.
|
georgesN — 26-01-2011 12:06 |
je dois me retenir de faire un commentaire blessant sur votre analyste, mais comme beaucoup, il confond neutralité et absence d'empathie avec dureté et pire: avec tentation d'influence. Ce qui me parait grave, car relever d'une pulsion d'emprise. D'après votre description, certes , mais je considère que vous dites la vérité.En tout cas votre vérité. Et c'est la seule qui vaille, à mes yeux. "quelqu'un qui a du mal à vivre le plaisir" On assène pas à quelqu'un comme vous des "vérités" aussi totalitaire que "manque à être" ou "dangereux pour vous". C'est le mot de gourou qui me vient.
|
rosette — 26-01-2011 12:26 |
Ouah ça fait peur....
mais je comprends ce que vous voulez dire.
Mais le psy est là aussi pour "mettre en garde" ou baliser...
la neutralité : je pense qu'il l'a souvent, mais c'est vrai qu'il m'a fait ce genre de retour, et moi qui étais enfermée déjà dans mon psychisme, ça n'arrange pas le fait de m'en sortir.
Merci encore pour votre intervention
ça fait du bien d'être comprise
|
rosette — 26-01-2011 12:29 |
ce que je peux corriger c'est que "dangeureux pour moi" c'est peut être mon interprétation, les véritables mots étaient "on ne sait pas comment vous allez réagir" le mariage "c'est la corde au cou"
|
georgesN — 26-01-2011 18:55 |
"le mariage "c'est la corde au cou"" et demain il fera beau à moins qu'il ne pleuve... :-)
|
rosette — 28-01-2011 09:16 |
je pense que je vais le quitter non pas parce que vous m'avez dit "gourou" mais parce que j'ai besoin de quelqu'un avec plus d'empathie.
maintenant il a fait ce qu'il a pu avec moi, car j'ai traversé des moments difficiles d'angoisse : j'aime mon ami, mais je ne veux pas perdre mon autonomie, et il y a eu un tel mélange d'émotions, et de ressentis par rapport à mon passé, et ma mère.
Alors il m'a retenu : - un de quitter de manière précipitée mon ami, alors que j'étais en phase de décompensation psychique - de me marier, ce qui m'aurait peut être fait chuter dans "une folie" tant mon autonomie aurait été "bafouée".
Le manque à être peut être que je ressens c'est ce manque à m'exprimer oralemement, à me positionner, à exister. beaucoup de choses non dites dans ma tête.
Peut être donc qu'en quittant aussi mon ami, je retrouverais un espèce d'équilibre psychique, car "aimer" m'entraine trop dans des conflits internes insupportables et vécus en silence...
merci de m'avoir répondu;
|
georgesN — 28-01-2011 10:15 |
dans votre choix à venir, essayez de vous souvenir que la plus grave tentation pour nous, psy, est de nous voir comme "Sujet Supposé Savoir" et par là, de nous autoriser à guider, à influencer, même si nous nous en défendons. Alors que la plus est essentielle tâche -et la plus noble!- est de permettre au Moi de nos patients de croître, se développer pour ...résoudre le transfert !
|
rosette — 28-01-2011 10:44 |
résoudre le transfert en ce qui me concerne, serait entre autre
- arrêter de croire que mon psy à la réponse et pas moi (cela vient d'une autorité parentale trop dictatoriale qui ne laissait pas le choix : c'est comme ça et pas autrement !!)
- arrêter d'avoir autant de culpabilités si je quitte mon ami par rapport à ma famille, mes amis et lui même qui ne me comprendraient pas
c'est drôle car hier soir (lors de ma séance) il m'a mis le doigt sur quelque chose à réflechir et qui pourrait être important chez moi : toutes ces pensées en moi non exprimées que ce soit avec mon ami, ma famille, mon travail et dans son cabinet qui me sont parfois opposées à ce que je vis, tant j'ai peur de mes pensées qui me paraissent trop noires, trop catégorielles..
c'est peut être pour cela que j'ai eu tant besoin d'aller sur les forums ou rencontrer des thérapeutes en dehors de mon psy.
|
georgesN — 28-01-2011 10:56 |
résoudre le transfert, en fait, c'est effectuer le travail de séparation-individuation que doit faire chaque enfant. Et en effet, le psy doit vous aider à trouver ce savoir qui est en vous et reste insu de vous. C'est peut-être vous, par phénomène de transfert, qui l'avez assigné à ce rôle de "maître à penser". Avoir peur de ses pensées est bien le signe d'un travail inachevé. Mais votre phrase nous entrainerait trop loin... Votre besoin de croiser les pensées d'autres thérapeutes pourrait interprèter comme un transfert diffracté: à vous d'en trouver le sens.
|
rosette — 28-01-2011 11:25 |
je dirais que je cherche à croiser les réponses des uns et des autres, et dans les nombreuses lectures pour ne pas avoir à chercher au fond de moi...
Je cherche toujours l'approbation chez les autres, il faut dire pour ma défense (car maintenant je m'en rends compte contrairement à une certaine période dans laquelle j'étais dans un état panique) que j'étais loin de moi...dans une espèce de bulle imaginaire
quand vous dites que le transfert c'est le travail de séparation-individuation d'un enfant, je le comprends, sauf que j'ai 45 ans !! bonjour le nombre d'années de retard.
Et on revient au début de l'échange : le manque à être (tellement identifiée à une mère qui s'est beaucoup niée) et sous la peur d'un père autoritaire, menaçant quant à l'amour vis à vis de ses enfants.
ce processus d'individualisation est long et se fait dans la souffrance : entre la peur de me retrouver seule, et à la fois la seule chose que je connaisse qui soit rassurante. un incessant va et vient entre "la toute puissance" et l'anéantissement !!
merci pour votre échange bienveillant
|
georgesN — 28-01-2011 16:18 |
précision: c'est la résolution du transfert qui est l'écho du processus de séparation-individuation ! Rassurez-vous: combien de gens "normaux" ont bien dépassé leurs 45 ans et n'ont toujours pas atteint pour autant un degré satisfaisant !
|
rosette — 28-01-2011 16:36 |
oui mais ces gens là ne se rendent pas forcément compte de leur névrose et donc n'en souffrent pas, ce qui n'est pas mon cas.
Si je comprends bien votre phrase, c'est en s'individualisant que l'on résoud son transfert, que ce soit avec son psy ou son entourage ?
|
georgesN — 28-01-2011 16:59 |
je préfère le néologisme "s'individuant" = devenant un individu: ce que fait un enfant : il se sépare de ses parents, au fil de l'enfance et les parents doivent (devraient!) l'y aider. (individualisant est trop proche sémantiquement de "individualisme", qui n'a rien à voir) Il y a de la souffrance dans ce processus et votre névrose qui est une réponse de ce qui fait manque dans ce processus est une souffrance. La percevoir est un progrès !
|
rosette — 28-01-2011 17:09 |
merci beaucoup pour vos interventions que je trouve très interessantes parce que très pertinentes.
Bon disons que je suis en progrès : c'est au moins un mot encourageant :)
|
georgesN — 28-01-2011 17:18 |
merci de votre appréciation . Continuez !
|
rosette — 09-02-2011 16:33 |
Monsieur, Je reviens vers vous afin que vous m’éclairiez par votre langage psy ; J’ai du mal avec mon désir, comme si j’étais en lutte permanente pour vivre, exister, et aimer. C’est vrai j’aime mon ami, et vis avec lui, mais ai du mal avec l’idée de l’engagement du couple, et pourtant je vais vers ce sens, car je ne vois pas ce que va être ma vie seule. J’ai vécu seule longtemps, ce qui me convenait, car j’étais enfermée et centrée sur moi, ce dont je ne m’apercevais pas. Quand j’ai rencontré mon ami, ça a été un véritable choc. J’avais tellement besoin d’être aimée. Je me suis aperçue que je n’existais pas en tant que personne mais en tant que « robot », je travaillais, avais quelques amis et ma famille mais étais super centrée sur mes affaires, ma petite vie (en même temps dans le sillage de ce que m’avaient inculqué mes parents) Maintenant je m’aperçois qu’il y a une vie autour de moi que j’ai envie de vivre, mais on ne passe pas à vivre sans plaisir, replié sur soi, une mise en retrait par rapport à la vie, les autres, à ouvert sur les autres, être en lien avec les autres, d’être présente au monde. De plus, cette manière d’être en retrait me procurait un certain plaisir, avec une certaine souffrance. J’existais dans l’adversité, le côté rebelle, le jugement . Je ne sais pas si je me fais bien comprendre. C’est comme si aujourd’hui je luttais du coup pour ne plus être enfermée et seule, afin de sortir d’un imaginaire… Ce qui me fait peur c’est que parfois, je ne vois pas d’issue à la dualité en moi (entre la vie et la non-vie), ni avec, ni sans mon ami. Comme quelque chose de fractionné en moi, ce qui parfois me donne l’impression que je vais « mourir ». Je rappelle que la vie de mes parents a pris toute la place dans notre vie familiale (mes parents étaient agriculteurs, et seul le travail comptait, je soupçonne même mon père s’être marié essentiellement pour faire prospérer sa ferme). Il a eu de la chance de trouver une femme qui s’est essentiellement consacrée à son but. Mais je ne pense pas que ce soit pour cette seule raison que je suis comme je suis. Ceci dit quand toute l’importance est donnée au travail et que le reste n’est pas mis en valeur, je pense que cela crée des carences. Alors bien sur, quand j’ai rencontré mon ami, nos sorties, nos vacances c’étaient comme une vie rêvée, mais la réalité du couple me ramène au couple parental….de plus, la femme en moi n’existe pas ; (l’identification à une mère qui s’est beaucoup niée en tant que femme). Je pense que malgré le travail sur moi, je reste toujours centrée, que j’ai du mal à donner (une femme vis à vis d’un homme) que le plaisir avec l’autre n’est pas toujours au rendez vous. C’est comme si j’étais toujours en retrait. Ma question est : « est ce possible de trouver une issue à une telle névrose ? » Bien sur je pourrai vivre seule :comme avant et cela ne me posait pas de problèmes sauf que maintenant, j’ai l’impression qu’il n’en sera pas de même : j’ai besoin d’être aimée, ce serait un manque pour moi. Bien à vous Rosette
|